[Astrid] Le destin s'amuse de nous

Elle avait terminé un nouveau chapitre de son prochain livre et, satisfaite d’elle-même face à l’avancée de son travail, la jeune femme avait pensé qu’elle pouvait maintenant sortir s’aérer un peu l’esprit. Petite robe en cette fin de mois d’avril, petit gilet, ballerine… Son sac sur l’épaule, Astrid quitte sa demeure pour rejoindre le parc. Alors que le soir ne va pas tarder à tomber, il règne ici une étrange quiétude revigorante et elle reste une bonne heure à marcher ici, ses écouteurs dans les oreilles, branchée à la playlist de son téléphone. Ce n’est qu’en se rendant compte du temps écoulé et du soir qui s’avance doucement, qu’Astrid décide qu’il est temps de rentrer. Mais au dernier moment elle change d’avis et se rend dans le café le plus proche, le cat’s coffee. Il y a foule ce soir et toutes les tables sont prises par des couples, des groupes d’amis. Elle avise un homme seul et sans reconnaître le petit ami de Lysander, qu’elle a pourtant déjà vu en photo, Astrid avance vers lui.

«- Bonjour, je peux m’asseoir avec vous !? Il n’y a plus de place...» s’excuse la jeune femme, son gobelet de thé à la main. Elle espère ne pas trop le déranger alors qu’il semblait perdu en pleine lecture.

La jeune femme est surprise comme l'homme lui parle en Français. Elle ne s'attendait pas à ce que le jeune homme sache parler sa langue natale et elle dessine sur ses lèvres un petit sourire un rien surpris. Mais elle se rend compte aussi que son interlocuteur n'a pas d'accent américain. Plutôt... comprenant qu'elle a probablement vu juste la rousse sourit davantage.

"- Je suis effectivement Francaise mais je suis arrivée depuis deux ans maintenant." repond la demoiselle. "Et vous depuis quand êtes-vous arrivés ?"

La demoiselle le regarde en se disant qu'elle le connait déjà. Elle a une impression de déjà vu. Une curieuse impression de connaître ce visage et pourtant elle est sûre de ne jamais lui avoir parlé. Et d'un coup elle comprend. Cela fait tilt dans son esprit. C'est Aiden. Le chéri de Lysander. L'homme amoureux de l'homme qu'elle aime. L'homme heureux avec l'homme que la rousse voudrait et se refuse à séduire. Elle essaie de ne rien montrer de ses pensées.

"- On m'a venté les mérites du paysage et de la vie ici, paisible, à Heatherfield. Je suis auteur et la tranquillité de cette petite ville rend l'écriture beaucoup plus facile. L'endroit est suffisamment calme pour ne pas être dérangé sans cesse. Ce n'est pas la même chose en France, à Lyon." répond la demoiselle en adressant un sourire à son interlocuteur.

Pourquoi ne dit-elle pas qu'elle connait Lysandre ? Et pourquoi ne se présentent-ils pas l'un à l'autre ? Il est rare qu'Astrid n'apprenne pas le nom d'un interlocuteur dans les quelques minutes, voire secondes, qui suivent la rencontre. Alors pourquoi... pourquoi les choses sont-elles différentes avec lui ? Comme si Astrid avait peur qu'il découvre, par son nom, ses pensées les plus secrètes. Celles qu'elle refoule.

La jeune femme sourit à son interlocuteur alors même qu’intérieurement elle se morigène de ne pas lui dire qu’elle connaît son petit ami. Parce que parler de Lysandre… risque de la faire rougir. Après tout elle fantasme sur le jeune homme, même si elle ne tente rien avec lui, même si elle n’essaie pas de le voler à Aiden, elle ne peut pas ne pas réagir du tout si elle parle de ce beau brun.

«- J’ai publié un ouvrage oui, la suite sort bientôt. » indique la jeune femme en préférant parler de son amour pour la littérature, sujets beaucoup moins délicat que les adorables fesses de Lysandre. «L’histoire n’est pas ennuyeuse et mon roman, quoique fantastique, aborde le sujet du voyage dans le passé si bien qu’il y est question d’histoire. J’ai essayé d’être la plus fidèle possible à la réalité mais quelques événements ont dut être modifiés après lecture par la maison d’édition, pour faire un peu plus… pour pimenter d’avantage l’histoire. Vous enseignez pour quel niveau ?»

La jeune femme adresse un sourire satisfait à son interlocuteur comme ce dernier répond trouver cela absolument fantastique. La demoiselle ne sait pas si cela l'est vraiment ou s'il dit ça pour lui faire plaisir mais elle sait néanmoins que si texte fait le bonheur de plusieurs professeurs qui peuvent l'étudier en litterature. Les professeurs d'histoire lui reconnaissent parfois le fait qu'elle intéresse les jeunes à des facettes de l'histoire mais dans un même temps d'autres s'insurgent contre les arrangements qu'elle a prit vis à vis de la réalité.


“- C'est vrai ? Je sais que l'on trouve que j’interesse les jeunes à l’histoire ce qui semble être une bonne chode mais beaucoup d'autres disent que mes arrangements éloignent les jeunes de la réalité. Pourtant je n'ai fais que des changements minimes afin de servir mon texte rien de plus.”


Elle sourit comme l'homme se présente et elle ne lui dit pas qu'elle le sait déjà pour ne pas éveiller ses soupçons.


“- Enchanté. Je m'appelle Astrid.”


Un nom français peu commun dans les environs puisque plus que français, il vient de la provence.

L'homme a probablement raison. Le fait d'écrire un livre donne peut-être le droit de prendre quelques arrangements avec l'histoire de sorte à pouvoir intéresser les jeunes à ces périodes de leur passé. Attentivement, la jeune française écoute ce qu'il a à dire, hochant parfois la tête avec un léger sourire pour l'homme. Et dire que c'est le type qui vie avec Lysandre. La jolie rousse, pour un peu, ressent un brin d'amertume se répandre en elle. Ce type a mieux qu'elle. Il a l'homme qu'ils veulent tout les deux. Elle est arrivée après. Alors respectueusement elle ne tente rien pour séduire Lys mais parler avec le petit ami de ce dernier n'est pas non plus ce qu'il y a de plus agréable. Parce qu'elle imagine ce type au bras de Lysandre, faire des projets avec lui.... Tout ce qu'elle-même n'a même pas le droit d'oser rêver.

"- Naturellement mais comme vous l'avez remarqué tout à l'heure, je ne suis pas d'ici. En France, en Provence surtout, c'est un nom encore rare mais qui n'est pas inconnu. Je doute qu'il y ait beaucoup d'Astrid en Amérique. Peut-être suis-je la seule ?" la jeune femme rit, avant de répondre au reste de ses questions. "Merci. Et je m'acclimate fort bien à l'Amérique. J'ai des amis, des voisins... mais aucun petit ami en vu !" répond la demoiselle. "Et vous une petite amie dans les parages ? Est-ce que je risque de me faire arracher la tête d'une minute à l'autre par une jeune fiancée en furie ?"

Elle rit. Elle sait que ce n'est pas le cas, bien entendu. Mais elle fait comme si elle ne connaissait rien au sujet de l'homme, histoire de jouer le jeu.

“- La France est selon moi encore bien mieux que cela. Elle n'est pas seulement merveilleuse. Elle est… il n'y a pas de mots pour la décrire je crois. C'est un pays magnifique. Avec une culture des plus intéressante et une gastronomie… tout le monde parle toujours des mets français avec beaucoup de gourmandise et de passion. Je peux vous assurer que ça n'a pas été volé !” lance la jeune femme avec un sourire.

Comme il parle de Lysandre la jolie rousse se raidir de manière imperceptible pour son interlocuteur mais le fait est qu'elle ne se sent pas vraiment à son aise à parler de Lys. Parce que si pour protéger son secret elle doit mentir au sujet du jeune homme…. Astrid n'a pas l'habitude de se comporter ainsi tout bêtement.

“- Oh je vois ! Cependant le fait qu'il soit sexy ne m'intéresse pas. Après tout vous êtes arrivé avant moi !” lance la demoiselle sans apprecier le nouveau tournant de cette conversation. "Pourquoi pensez-vous donc que nous nous entendrions si bien lui et moi ?" Demande la jeune femme alors qu'elle sait bien que c'est un fait. Une pure vérité. Lysandre et elle s'entendent à merveille.

La jeune femme adresse un sourire à son interlocuteur comme ils continuent de discuter mais elle voudrait que la discussion change de sujet comme discuter de Lysandre ne lui est pas agréable dans ces conditions. Entendre cet homme vanter les mérites de celui qu'elle aime a quelque chose de triste et ce même si la demoiselle a toujours su que le jeune homme ne pouvait pas être pour elle. Entendre Aiden parler ainsi que Lysandre fait mal parce qu'elle-même ne pourra jamais en dire autant au sujet de son éditeur. Et c'est pourtant l'un de ses désirs les plus chers bien malgré elle.

"- Et comment réussissez-vous à éveiller l'intérêt parfois plus qu'assoupie de vos élèves pour votre matière ?" Demande la jeune femme pour changer de sujet.

La jeune femme hoche la tête alors que le professeur lui explique ne pas en avoir grand-chose à faire de l'intérêt que les étudiants portent à sa matière. Oui vu comme cela les choses sont plus faciles en effet. Mais une idée lui vient en tête tout à coup.

“- L'idée est peut-être idiote mais je pourrai essayer d'écrire des livres historiques. Des nouvelles sur quelques périodes. Cela pourrait aider les jeunes à s'y intéresser. Je ne sais pas trop si ce serait une bonne idée en soit. Qu'en pense le professionnel que vous êtes ?” interroge la jeune femme d'un petit air pensif.

Pourquoi ne pas envisager l'idée ? Après tout cela pourrait peut-être intéresser les jeunes à l'histoire du monde. Mais il y a aussi un handicap et non des moindres pour la demoiselle… ses origines françaises qui ne sont pas en phase avec l'histoire américaine qu'elle ne connait presque pas.

“- Enfin il me faudrait collaborer avec des professeurs car je connais trop peu l'histoire du pays.”

"- Oh l'idée est peut-être sotte c'est vrai, ils sont plus sensibles à la télévision, j'en veux pour preuve leur amour incompréhensible à mes yeux pour cette série, Game of Throne. En êtes-vous spectateur ? Je sais que certains professeurs d'histoire, pour ne pas dire la plupart, reprochent les dégâts que cette série produit sur la pensée des élèves au sujet de ce qu'ils pensent savoir sur l'époque médiévale ?"

Hochant la tête la jeune femme écoute les propos de son interlocuteur tout en réfléchissant, se perdant alors dans ses réflexions. Elle se montre un rien distraire, pendant une poignée de secondes, comme l'homme parle et elle finit par se secouer, comme si elle réalisait qu'il lui adresse la parole.

"- Oui quand aux petites filles elles adorent les histoire de princesses mais il n'y en avait pas à toutes les époques et si je veux respecter le rôle des femmes en certaines périodes cela sera compliqué, aussi il me faudra réfléchir à ce point... Les plus vieux aimeront un personnage un peu plus dingue, je pense ? Un peu plus... je ne sais pas mais surprenant, peut-être ?"